Jean-Pierre Chevènement : l’homme qui a toujours dit non par les fils de France

Dans le microcosme politique français, il a toujours été ailleurs. Au-delà de la droite et de la gauche, sans jamais perdre la France dans sa ligne de mire… Portrait. 

Cet esprit libre, né le 9 mars 1939 à Belfort, a toujours fait preuve d’une rare indépendance intellectuelle. Pur produit de la méritocratie républicaine, il est boursier à l’Institut d’études politiques de Paris et le mémoire qu’il rédige,La droite nationaliste face à l’Allemagne, est dédié à Raoul Girardet, universitaire alors proche de l’OAS. Lequel écrira dans ses mémoires, Singulièrement libre : « Le seul élève avec lequel j’ai été réellement lié était Jean-Pierre Chevènement. C’était pendant la guerre d’Algérie. Nous partagions les mêmes ardeurs patriotiques, auxquelles il ajoutait de son côté une ferveur volontariste, activiste et révolutionnaire… »

On le retrouve plus tard, à la tête du CERES, Centre d’études de recherche et d’éducation socialiste, club de réflexion grâce auquel François Mitterrand prend le pouvoir au sein du Parti socialiste, lors du Congrès d’Épinay, en 1971.

Alors, Jean-Pierre Chevènement, si à gauche que ça ?

Oui, en ce sens où il appelle de ses vœux l’alliance avec le Parti communiste – ce sera le Programme commun de la gauche un an plus tard, et l’arrivée à l’Élysée, le 10 mai 1981, avec quatre ministres communistes au gouvernement. On dit même que le logo d’alors du PS, la rose au poing, serait le fait d’un de ses proches, Paul Calendra.

Et si Jean-Pierre Chevènement était aussi de droite ?

Il est un fait que notre homme a toujours défendu une vision volontariste de la politique. Souverainisme en matière de relations étrangères et confortation de l’industrie française en ses frontières. Un gaulliste de gauche ? Un patriote socialiste ? La thèse peut se défendre. Et puis, de toute manière, de quelle droite et de quelle gauche parle-t-on ?

Mais ce contre quoi Jean-Pierre Chevènement semble avoir toujours lutté, finalement plus dans son propre camp que dans l’autre, c’est cette fameuse “Deuxième gauche”, également surnommée “Gauche américaine” : celle de Michel Rocard, pour aller court. Soit une gauche qui tenait, dès 1981, la mondialisation financière pour inéluctable, l’alignement de la France sur Washington pour inévitable, l’Europe telle que voulue par Jean Monnet et Jacques Delors pour horizon indépassable. Avec le cortège de drames qui s’en est suivi : désindustrialisation de la France, chômage de masse et culte du franc, puis de l’euro fort.

Cette dérive, Jean-Pierre Chevènement l’a dénoncée avec vigueur dans l’un de ses derniers ouvrages, La France est-elle finie ?(1) Bien sûr, le tournant de la rigueur en 1983, avec l’arrivée de Laurent Fabius à Matignon. Mais aussi la première Guerre du Golfe, qui le pousse à démissionner de son poste de ministre de la Défense. Deux ans plus tard, il sera l’une des grandes voix de gauche à prôner le “non” au référendum de Maastricht, joignant en cela sa parole à un Philippe Séguin, un Charles Pasqua, un Philippe de Villiers et un Jean-Marie Le Pen. Avant de se montrer plus que réservé sur le bourbier yougoslave, imbroglio ayant conduit à massacrer les musulmans bosniaques pour ensuite permettre à l’ OTAN de bombarder des chrétiens serbes, tandis que les USA plaçaient leurs pions en cette région plus que cruciale pour la sécurité de la vieille Europe. Toujours à rebours de l’air du temps, on notera que, quelques années av

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