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Pour la quatrième année consécutive, la Fondation France Israël a permis à des descendants de Justes parmi les Nations, âgés de 18 à 30 ans, de rendre hommage à la mémoire de leurs grands-parents qui, au péril de leur vie, ont sauvé celles de Juifs en danger durant la seconde guerre mondiale.
Rencontre hier à Cognac avec Otto Fischl, à peine arrivé d'Australie. Le "petit juif". PHOTO/Photo S. U.Caché avec les siens à Salles-d'Angles de 1942 à 1944, l'Australien Otto Fischl est de retour en Charente Il doit la vie à Aneska et Joseph Stacke qui seront élevés demain au rang de "Justes parmi les Nations".
Otto Fischl n'a pas oublié la grande maison de la rue de Mortemer, à Salles-d'Angles. Le petit juif tchèque se souvient du caractère trempé de Joseph Stacke, de l'éducation stricte d'Aneska, des six enfants qui s'agitaient dans la propriété. Il revit, comme si c'était hier, ces moments, entre 1942 et 1944, où il se réfugiait dans la chambre, à l'étage, avec son frère et ses parents dès qu'un étranger frappait à la porte. "Joseph et Aneska Stacke nous ont ouvert les bras et caché pour rien. Sans eux, nous aurions péri. Je n'ai pas de mots pour exprimer ma reconnaissance", s'émeut aujourd'hui l'aîné des fils Fischl, 84 ans, dans un français impeccable.
À peine débarqué hier de son avion en provenance de Sydney en Australie, Otto (devenu Gerry, un prénom plus anglo-saxon) grimpe sans se faire prier dans la machine à remonter le temps. S'il a fait un si long voyage, dit-il, c'est moins pour raviver ses souvenirs, que pour rendre hommage à ses sauveurs: demain, les Stacke, eux aussi originaires de Tchécoslovaquie, seront élevés au rang de "Justes parmi les Nations" (lire encadré)."C'était la moindre des choses que je sois ici. Ce qu'ils ont fait pour nous est tellement incroyable", insiste le retraité, devenu un homme d'affaires spécialisé dans le négoce du cuir.
Son histoire avec la Charente débute "le 14 juillet 1942. Ce jour-là, mon frère Alex et moi arrivons par le train à la gare d'Angoulême.Mes parents étaient entrés en contact avec les Stacke, je ne sais comment. Monsieur Stacke cherchait quelqu'un pour aider sa femme qui avait six enfants à élever. Ma mère a obtenu le poste. Cette grande famille a accepté de nous recevoir tous les quatre". Au péril de leur vie, à l'heure des rafles et des déportations de masse.
"Je n'aurais pas eu le courage de prendre de tels risques"
"Je crois savoir que Monsieur Stacke avait eu très faim dans son enfance en Tchécoslovaquie. Une famille juive lui avait alors offert le couvert. Il n'a pas oublié et s'était promis, un jour, de rendre la pareille". À Salles-d'Angles, poursuit Otto, les Stacke n'étaient pas les seuls à connaître le secret de la famille juive cachée. "Le curé du village et les soeurs savaient. Ils venaient plusieurs fois par semaine. C'est grâce à eux que j'ai appris l'histoire, la grammaire, la littérature".
Dans la maison il y avait aussi les personnels de maison, Hanka et Franta. "Des Polonais. Personne ne nous a jamais dénoncés". Otto Fischl l'admet, dans le cocon de Salles-d'Angles, il n'a pas mesuré qu'un drame se jouait en Europe, que des juifs mouraient dans les camps. "J'étais un enfant. J'ai traversé la guerre dans une relative insouciance. Je n'ai jamais ressenti la faim, n'ai jamais vraiment éprouvé la peur. C'est beaucoup plus tard, adulte, que j'ai compris".
Les Stacke étaient des antiquaires de renom dans la région et ils recevaient souvent des clients allemands dans leur maison. Accusé à tort d'être un "collabo", Joseph est arrêté le 3 septembre 1944 par les FFI (Forces françaises de l'intérieur). Il a alors été traité de"boche". "C'est ce jour-là qu'il nous a fait sortir de notre cachette". Pour prouver qu'il avait caché des juifs. Et éviter une justice expéditive. "Les Stacke étaient eux-mêmes des étrangers à Salles-d'Angles. Mal vus par beaucoup de monde". Ils ont souffert d'être rejetés jusqu'à leur mort. Au crépuscule de sa propre vie, Otto Fischl veut plus que tout rétablir la vérité. Réhabiliter les Stacke, enfin "Justes parmi les Nations".
Il fait enfin un aveu, en toute humilité. "À leur place, je crois que je n'aurais jamais eu le courage de prendre de tels risques".
Stéphane URBAJTEL
source: http://www.charentelibre.fr/2013/05/08/la-memoire-intacte-du-petit-juif,1834625.php du 08/05/2013
Myriam et Norbert lors de la remise de la médaille de Juste à Marianna en 2009.Dimanche 22 février 2009, une grande cérémonie avait eu lieu à Loos-en-Gohelle avec la remise de médailles de Justes parmi les Nations à Marianna Sloma-Tysiak ainsi qu'à ses parents à titre posthume.
Dimanche 28 avril, c'est un square qui sera inauguré, rue Jean-Leroy.
C'est l'histoire d'une reconnaissance qui a ébranlé toute une ville, suite à cette découverte. En 2005 paraît, dans la revue d'histoire locale Gauheria, un article sur Loos-en-Gohelle
et les activités de la Résistance de l'immigration polonaise (POWN). Traduit d'un texte original polonais datant de 1945, il mentionne le cas d'un couple, les Tysiak, qui aurait caché
deux enfants juifs à partir de 1942. Sylviane Roszak, professeur d'histoire au collège Cassin, engagée avec ses élèves dans le concours national de la Résistance et de la Déportation
dont le thème était justement Résistance et sauvetage, aidée de Jacqueline Lucas, parent d'élève, et Florence Chaumorcel, directrice de la bibliothèque municipale, décide de se mettre
en quête de cette famille. Après plusieurs recherches, ils apprennent que M. et Mme Tysiak sont décédés mais que deux filles, Johanna, née en 192,3 et Marianna, née en 1925, vivent
toujours.
Autre découverte importante : Marianna, qui se nomme Sloma par son mariage, habite toujours Loos... à l'endroit même où les enfants juifs étaient cachés ! Jamais elle n'en a parlé
officiellement. Elle avait pourtant 19 ans à l'époque des faits héroïques et participait elle-même à d'autres actions de la Résistance.
Les collégiens remportent un prix mais Sylviane Roszak, Jacqueline Lucas et Florence Chaumorcel ne veulent pas en rester là et décident de monter un dossier adressé au mémorial Yad
Vachem... où l'on était au courant du cas ! En effet, quasiment dans le même temps, Myriam et Norbert, les enfants Juifs sauvés pendant la guerre et qui vivent désormais en Israël, ont
fait aussi une demande pour que les parents Tysiak et Marianna soient officiellement qualifiés de Justes parmi les Nations. Ce qui s'en suivra en février 2009.
Aujourd'hui, Marianna est décédée. Dimanche 28 avril, c'est un square des Justes parmi les Nations qui sera inauguré. Et en présence de Myriam et Norbert qui viennent spécialement
d'Israël. Pendant la Seconde Guerre mondiale, ils ont été cachés par la famille Tysiak, de la barbarie nazie, dans la petite maison route de Béthune. Les deux enfants français nés à
Lens, âgés respectivement de 7 et 3 ans à l'époque, sont arrivés juste avant la grande rafle de Lens du 11 septembre 1942. Leurs parents les avaient confiés à la famille Tysiak. « Ils
nous ont expliqué que nous devions nous cacher dans un réduit attenant à la maison, et à la moindre alerte, c'est-à-dire sitôt que le chien aboyait, nous réfugier dans la porcherie. Ils
nous ont exercés à grimper par l'échelle, à l'espèce de grenier surmontant les cochons, et à nous dissimuler parmi les ballots de paille », raconte Myriam dans son récit intitulé La
petite fille dans la porcherie. Une ferme qui était aussi le QG de la résistance polonaise. « Ce n'était pas une famille ordinaire ! » Deux ans à vivre comme cela, la peur au ventre,
avant l'arrivée des Américains et la Libération.
Camille JANIK
source: http://www.lasemainedansleboulonnais.fr/actualite/boulogne/2013/04/29/article_un_square_erige_en_reconnaissance_des_ju.shtml du 25/04/2013