Robert Chambeiron, président-délégué de l' ANACR, est aujourd'hui le seul à pouvoir
témoigner de la préparation et du déroulement de la réunion constitutive du "Conseil national de la Résistance" à laquelle il participa. Proche de Jean Moulin, l'initiateur et le premier
président CNR, il en sera le secrétaire-général adjoint. C'est donc un témoin privilégié que nous avons interrogé. Ses réponses apportent à la connaissance historique d'un organisme dont
l'existence et le programme ont puissamment contribué à la libération de notre pays et à sa reconstruction, même si toutes les espérances dont ils étaient porteurs n'ont pas toutes été
satisfaites. Laissons la parole à Robert Chambeiron. Le C.N.R a été constitué le 27 mai 1943. le processus ayant conduit
à sa création a été initié à quelle époque?
Robert Chambeiron: Il est
difficile de situer avec précision la date des premières initiatives ayant conduit à la création du C.N.R. La Résistance a été un corps vivant, et son évolution n'a pas échappé aux
mouvements qui agitaient la société de l'époque. Beaucoup de temps s'est écoulé entre l'effondrement de juin 1940 et la prise de conscience de la nécessité de s'unir.
Dès le début, la Résistance est fragmentée. Il n'y a pas, ou peu, de liaisons entre les mouvements et encore moins avec Londres. En outre, les formes d'organisations et d'action ne sont
pas les mêmes dans la Zone occupée, en prise direct avec l'occupant et son appareil répressif, et dans la Zone dite libre où une certaine liberté de mouvement, même réduite, existait, au
moins jusqu'au mois de novembre 1942.
Le débarquement allié en Afrique du Nord, l'écrasement de l'armée Von Paulus sur le front de Stalingrad, une répression de plus en plus féroce, l'institution du Service du Travail
Obligatoire, c'est-à dire la déportation organisée de la jeunesse française en Allemagne pour combler les pertes subies par l'armée hitlérienne sur le front soviétique, notamment vont
détruire le mythe d'une Allemagne invincible, apporter aux Français des motifs de résister aux nazis et à Vichy, et de s'approcher progressivement de la Résistance, dont l'action a pris
de l'ampleur significative.
Mais, pour vaincre, il faut être uni. Les bataillons ne sont pas suffisants, il faut une armée. Ce sera l'objectif de Jean Moulin dès le début 1941. Recenser les forces de la Résistance
sur le sol national, et rencontrer le Général de Gaulle pour assurer l'unité de combat de la Résistance intérieure et de celle qui opère sur les théâtres extérieurs de guerre. Si des
signes très forts sont apparus sans la volonté d'union des principaux dirigeants des mouvements de Résistance, disons au cours de l'année 1942, le véritable tournant de la Résistance se
situe le 27 mai 1943, quand Jean Moulin réunit le " Conseil National de la Résistance". pour cela il a fallu surmonter bien des obstacles, mais le but a été atteint, l'unité
totale. L'origine de la création du C.N.R se situe t-elle à Londres
ou en France occupée ?
R.C.:Historiquement, les initiatives ayant conduit à la création du C.N.R. sont
venues de la France occupée. Et Jean Moulin en est le symbole. A Londres, il parlait au nom de la Résistance intérieure. Et il a été le seul commissaire (c'est à dire ministre) dans le
Comité Français de Libération Nationale (C.F.L.N) présidé par de Gaulle qui assumât ses fonctions sur le sol national. A compter de janvier 1942, lorsque Jean Moulin revient de son
premier séjour à Londres, c'est en accord avec le C.F.L.N et son président que seront menées les négociations, souvent ardues, avec les mouvements, les syndicats et les partis
républicains résistants.
La création du C.N.R donne à la Résistance unie une dimension nationale et une autorité accrue, en même temps qu'elle apporte au Général de Gaulle la légitimité que lui contestaient les
alliés anglo-saxons. Les manoeuvres de Vichy, à travers la personne du Général Giraud, ont échoué, et le danger est écarté de l'installation en France d'une administration
militair
http://www.anacr.com/htfr/0006.htm
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