Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Cercle Jean Moulin ®

Cercle Jean Moulin ®

Co-Président d'Honneur Daniel Cordier, Secrétaire Particulier de Jean Moulin, Hubert Faure, membre des 177 du Commando Kieffer, membre d'Honneur Suzanne Escoffier, petite cousine et filleule de Jean Moulin Association Mémorielle Patriotique et Républicaine. cercle.jean.moulin71@sfr.fr 07 81 34 85 48


CEREMONIE 20 MARS 2018 STELE DE BAGNEAUX A MELAY DISCOURS DE JEAN-CLAUDE DUCARRE, MAIRE DE MELAY ET PRESIDENT DE L’ACALM UNE NUIT…UN AVION...UN ESPOIR

Publié par via le Cercle Jean Moulin sur 3 Avril 2018, 21:21pm

Catégories : #Jean Moulin

UNE NUIT… :

Il y a 75 ans…au lieudit « L’Ile de Bagneaux »… il faisait nuit…tout était calme malgré le contexte de la guerre … la lune se reflétait sur les eaux du canal et de la Loire.

Des jeunes gens jouaient aux cartes chez une amie dans une maison du hameau des Gallands.

 

… UN AVION… :

Soudain un bruit de moteur au loin…quelques feux furtifs sur les prairies environnantes…un avion qui se pose… puis repart.

L’un des jeunes témoins se nomme Pierre DRU.

Des années plus tard, il sera élu Maire de MELAY et ce jusqu’en 1989, année au cours de laquelle il finalisera ses recherches avec la création de l’ACALM (Association commémorative de l’atterrissage d’un Lysander à MELAY) le 16 août 1989. Ce sera la révélation après 46 ans de silence et de secret sur ces faits historiques.

 

…UN ESPOIR… :

Le 24 mars 1990, plus de 2 000 personnes étaient rassemblées pour assister à l’inauguration de cette stèle en présence de plusieurs personnalités importantes :

André MERIC, Secrétaire d’Etat aux anciens combattants,

 Alain POHER, ancien Président du Sénat,

Le Général SIMON

André JARROT, Compagnon de la Libération

La famille de Jean MOULIN

Et surtout Christian PINEAU, l’un des 3 grands Résistants déposés par le Lysander et Henri MORIER, opérateur au sol lors de cette fameuse opération SIRENE II.

 

---

 

J’ai envie de vous demander à chacune et à chacun en cet après-midi : Pourquoi êtes-vous venus ? A quoi bon ?

75 années se sont écoulées !... Vous avez sans doute tant à faire par ailleurs… Des atterrissages et des parachutages clandestins, il y en a eu des milliers ici et ailleurs… A quoi bon se rassembler ici encore dans ce village perdu du Brionnais dans la froidure de cet hiver qui s’attarde.

 

UNE NUIT…UN AVION…UN ESPOIR !

Si nous sommes là… si je suis là, c’est parce que cet atterrissage est désormais grâce à Pierre DRU et aux pères fondateurs de l’ACALM, cet atterrissage est désormais entré dans l’Histoire avec un grand H.

« Nous venions en quelques minutes, de recevoir les 3 résistants les plus importants de France » déclarait Henri MORIER, opérateur au sol lors de l’inauguration de cette stèle.

Jean MOULIN, unificateur de la Résistance

Le Général DELESTRAINT, chef de l’Armée Secrète

Et Christian PINEAU, chef du réseau Phalanx.

Si nous sommes là, c’est aussi parce que cet atterrissage constitue un évènement symbolique des faits de Résistance de cette période et que, notre présence constitue un hommage à tous ceux qui ont œuvré plus modestement, plus discrètement au succès de la Libération de notre Pays et à la défense des valeurs auxquelles nous sommes attachés.

Je pense bien sûr à Henri MORIER, à Pierre DELAYE le radio et à son frère Jean, au garagiste de Marcigny M. COMMERCON, à Noël ROBIN et Henri GIRARD qui avaient repéré le terrain au préalable.

Christian PINEAU disait ici même le 24 mars 1990 : « J’ai voulu ainsi vous montrer que la Résistance française, et ma conclusion vous surprendra peut-être, ce n’était pas seulement les quelques chefs, souvent cités et honorés, mais des milliers de « petits, d’obscurs, de sans grade » selon le vers d’Edmond Rostand :

  • Nos radios qui faisaient le plus dangereux des métiers et dont bien peu ont échappé à la gestapo.
  • Les agents qui préparaient et exécutaient les atterrissages, les parachutages, les transports d’armes.
  • Les courriers qui risquaient leur vie en portant un pli, en mettant une lettre dans une boîte.
  • Les familles qui recevaient chez elles et nourrissaient des agents français ou anglais, radios, évadés, aviateurs anglais tombés du ciel sur la terre de France.
  • Ces maquisards dont les actes n’ont été célébrés qu’à titre collectif alors que c’était des hommes comme nous, avec leurs familles, leurs amours, leurs espoirs d’hommes jeunes et pleins de vie.
  • Ceux qui ont recueilli des familles juives en les sauvant ainsi des chambres à gaz.
  • Ceux, … mais ils sont nombreux, hommes, femmes et même enfants, qui ont risqué leur vie et souvent l’ont donné avec un objectif commun, la libération de la patrie.

Tâches souvent modestes mais toujours dangereuses !

Comme disait le poète Victor de Laprade : « Ils ont plus que la gloire : ils ont fait leur devoir ».

C’est à ces modestes résistants, en particulier à ceux qui ont été fusillés, torturés, gazés, partis en fumée dans le ciel des crématoires, que je dédie cette cérémonie. S’ils avaient survécu à ma place, Jean MOULIN et le Général DELESTRAINT auraient pensé et agi comme moi.

Modestes ces petits ? Le mot n’est pas tout à fait de circonstance : au temps des oublis et des mensonges, ils ont out simplement sauvé l’honneur de la France. »

Si nous sommes là en ce 20 mars 2018, c’est parce que nous n’oublions pas, je n’oublie pas, que dans le mois de mai 1943 après cet atterrissage des arrestations successives ont eu lieu suite à des dénonciations : à Iguerande, à Ligny-en-Brionnais, à Charlieu, à Fleury-la-Montagne et dans la région roannaise.

Le Docteur ROBERT… Ernest LAPALUS …Antonin VIZIER… longue liste de noms dont certains ne sont pas revenus des camps. Parmi ces disparus, j’ai une pensée particulière pour le boulanger d’Iguerande Noël ROBIN, mort à DORA et pour Henri GIRARD tué par les Allemands près de Belfort. Tous deux avaient participé à la préparation de cet atterrissage.

Si je suis là en ce 20 mars 2018, c’est qu’il y a quelques années, jeune étudiant, participant à un échange avec l’université d’agriculture de VARSOVIE, j’ai eu l’occasion de pénétrer dans le camp d’AUSCHWITZ. C’était au mois de février… il faisait un froid vigoureux… les baraquements étaient couverts de neige… à l’intérieur, l’évocation de l’indicible avec des tas de cheveux, de prothèses, de lunettes, de bagages… et dehors le silence… un silence à nul autre pareil… un silence qui vous glace… un silence qui vous saisit… un silence qui vous interpelle au plus profond de votre être… un silence comme un cri… comme un sanglot… comme un appel… un silence que jamais l’on ne peut oublier jusqu’à son dernier souffle !

 

UNE NUIT …UN AVION … UN ESPOIR !

Oui, si je suis là… si vous êtes là en cet après-midi du 20 mars 2018… c’est aussi pour l’espoir !

C’est pour être des passeurs de Mémoire.

Et l’espoir, il est là devant nous : ce sont les jeunes à qui nous devons transmettre ce flambeau de la Liberté qui nous a été confié par nos ainés.

Le 10 mars dernier, à Saint Maurice-Les-Châteauneuf, une association créée par des jeunes Brionnais a souhaité   rendre hommage aux femmes pendant la guerre et aux femmes qui ont lutté pour leurs droits.

Cette association « Jeunes, créons ensemble » a rendu un hommage particulier à Simone VEIL, qui sera inhumée au Panthéon en juillet prochain.

Simone VEIL disait :

« Je n’aime pas l’expression « devoir de mémoire » : le seul devoir, c’est d’enseigner et de transmettre. »

Alors oui, si nous sommes ici c’est pour transmettre… pour être ces passeurs de Mémoire.

Et en ce 75ème anniversaire, quelle récompense… quel cadeau nous est offert ! : C’est Titine « Mémorial roulant en hommage à la Résistance et à Jean MOULIN »

Titine est cette traction restaurée depuis 7 ans par les élèves du Collège Jean MOULIN de Montceau-Les-Mines avec l’aide bienveillante et attentive d’éducateurs et de bénévoles.

Je tiens à saluer l’ensemble de ces bonnes fées qui se sont penchées sur le « berceau de Titine » pour lui permettre d’être rutilante à nos côtés en ce jour. Cette équipe a su trouver un langage « pour enseigner… pour transmettre » aux jeunes… trouver un chantier qui au-delà des apprentissages les a ouverts sur les valeurs essentielles de notre Monde. Un lien qui leur vient du passé et tend vers leur avenir.

En ce 20 mars 2018… oui, je sais pourquoi je devais être là.

 

UN JOUR…UNE TRACTION…UN ESPOIR !

 

Oui, l’espoir Résister c’est espérer !

C’est ce message, à vous les plus jeunes que nous voulons vous offrir.

Résistez ! Indignez-vous !

Comme l’écrivait Stéphane HESSEL, « Je vous souhaite à tous et à chacun d’entre vous, d’avoir votre motif d’indignation, c’est précieux ! 

Dans ce monde, il y a des choses insupportables. Pour le voir, il faut bien regarder, chercher… Je dis aux jeunes : cherchez un peu et vous allez trouver. La pire des attitudes, c’est l’indifférence. Dire « Je n’y peux rien, je me débrouille ». En vous comportant ainsi, vous perdez l’une des composantes essentielles qui font l’humain. Une des composantes indispensables : la faculté d’indignation et l’engagement qui en est la conséquence ».

Résister, c’était ici à Melay il y a 75 ans.

Résister c’est aujourd’hui encore ici et ailleurs dans le monde et je voudrais poursuivre mon propos en évoquant un acte de Résistance contemporain qui m’a particulièrement touché.

Un ami m’a fait découvrir un ouvrage écrit par Delphine MINOUI, grand reporter au Figaro et spécialiste du Moyen Orient. Durant de nombreux mois, elle a correspondu via Skype avec un groupe de jeunes rebelles syriens prisonniers dans la ville martyrisée de DARAYA ;

Cette banlieue a subi de 2012 à 2016 un siège implacable, 4 années de descente aux enfers, rythmées par les bombardements aux barils d’explosifs, les attaques au gaz chimique, la soumission par la faim.

Face à la violence du régime de Bachar Al-Assad, une quarantaine de jeunes syriens a fait le pari insolite d’exhumer des milliers de livres ensevelis sous les ruines pour les rassembler et créer une bibliothèque clandestine calfeutrée dans un sous-sol de la ville.

A quoi bon sauver des livres…quand on ne peut sauver des vies !

A quoi bon…pour vivre encore !  Vivre encore !

Voici les premières lignes de cet ouvrage : « Les passeurs de livres de DARAYA »

« Il n’existe pas de prison qui puisse enfermer la parole libre. Il n’existe pas de blocus assez solide pour empêcher l’information de circuler ».

Je sais pourquoi je suis là en ce 20 mars 2018, 75 ans après l’atterrissage du Lysander à Melay.

Je terminerai mon propos par cette citation extraite d’un discours de Simone VEIL, en 2005

« L’humanité est un vernis fragile, mais ce vernis existe. En parlant de ce monde à part qui fut celui des camps et de la tourmente dans laquelle les Juifs furent emportés, nous vous disons cette abomination, mais nous témoignons aussi sur les raisons de ne pas désespérer. D’abord, pour certains d’entre-nous, il y eut ceux qui nous aidèrent pendant la guerre par des gestes parfois simples parfois périlleux, qui contribuèrent à notre survie. Il y eut la camaraderie entre détenus, certes pas systématique dont les effets furent ô combien salutaires. Et puis, pour cette infime minorité qui regagna la France en 1945, la vie a été la plus forte ; elle a repris avec ses joies et ses douleurs. Puissent nos rires résonner en vous comme notre peine immense. Notre héritage est là, entre vos mains, dans votre réflexion et dans votre cœur, dans votre intelligence et votre sensibilité. »

Je sais pourquoi je suis là en ce 20 mars 2018, 75 ans après l’atterrissage d’un Lysander à Melay !

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article

Archives

Nous sommes sociaux !

Articles récents