Les feuilletons politico-judiciaires, on le sait, on le voit, c’est souvent compliqué ; il
faut enquêter, piétiner, échafauder des hypothèses, faire attention à ce que l’on dit ou écrit car les avocats veillent. Et le résultat, au conditionnel, est malheureusement souvent
mi-chèvre mi-chou, difficilement vendable.
Alors au diable la difficulté se disent de plus en plus d’« enquêteurs » !
Libérons-nous de tous ces tracas ! Le téléfilm « Crime d’Etat » que nous a servi hier soir France 3 sur l’affaire Boulin cumule les deux grandes
facilités de ce nouveau journalisme d’aisance : inventer des faits et des scènes – c’est bien pratique finalement – et prendre de préférence des histoires bien anciennes, le temps
passé ayant comprimé et flouté une chronologie avec laquelle il est plus facile de prendre des libertés. Sans oublier l’avantage décisif de la disparition de certains témoins et acteurs
auxquels on peut faire dire n’importe quoi sans trop de risques.
Passons sur le côté pitoyable et grand-guignolesque de « Crime d’Etat » ,
avec la voix off du cadavre de Robert Boulin commentant de manière goguenarde l’affaire de sa mort : « Je n’ai jamais eu aussi froid de ma vie », explique-t-il, au
fond de l’étang où on l’a retrouvé, avant de confirmer lui même qu’« on a assassiné un ministre de la République » (Qu’est allé faire dans cette galère l’excellent
François Berléand ?).
Le réalisateur de « Crime d’Etat », Pierre Aknine, a transformé la ténébreuse
affaire Boulin en lumineux homicide. Et il a trouvé le coupable : Jacques Foccart, présenté comme le véritable chef de la droite et derrière lequel semble trottiner gentiment Chirac
et Pasqua. Le mobile ? Boulin, gaulliste social, aurait pu contrarier les plans chiraquiens en permettant à Giscard d’Estaing de le nommer Premier Ministre. Et il les menaçait de
révélations sur le financement du RPR. L’exécution ? « Crime d’Etat » nous révèle – sous le couvert de la « fiction », attention… - que Boulin a été
assassiné dans les sous-sols de la magnifique maison de Foccart.
La mort de Robert Boulin est bien un « assassinat politique », comme le fut auparavant celui de Chaban-Delmas avec la sort