
Pour l’armée et pour l’Etat français, la première guerre du Golfe était une guerre propre. Vingt ans après, de nouveaux éléments laissent planer le doute.
C’est une guerre déjà oubliée, presque d’une autre époque. Alors que l’armée française assure que son offensive au Mali se fait dans des conditions idéales, les vétérans de la première guerre contre l’Irak, en 1991, n’arrivent toujours pas à faire reconnaître les séquelles et les conséquences sanitaires graves que ce premier conflit de l’ère moderne a causées sur eux.La raison? Pour l’armée comme pour l’Etat français, les cancers, leucémies et maladies pulmonaires développés par des centaines de vétérans n’ont rien à voir avec les opérations militaires.
Alors que les Etats-Unis ont fini par reconnaître ces maladies qui avaient été désignées par le terme «
syndrome de la guerre du Golf e » et ont versé une pension d’invalidité à 200 000 vétérans, la France nie tout en bloc. Pourtant, certains éléments de
l’enquête pénale encours au Pôle santé du parquet de Paris, instruite par la juge d’instruction Marie-Odile
Bertella-Geffroy, laissent songeurs.
Pour la première fois depuis la guerre, des hauts gradés reconnaissent que des munitions à « uranium
appauvri » ont « pu être utilisées » par l’armée française, ce que nient encore aujourd’hui ses responsables. L’uranium appauvri, utilisé pour percer les blindages et les bunkers, est sujet à
controverse et suspecté de contaminer les soldats. Dans son audition, le général Meille, commandant du 2e RIMa, indique : « Je savais à l’époque que les chars français AMX 10 pouvaient tirer
des obus-flèches à noyau à uranium appauvri. Nous étions techniquement au point. Ces obus-flèches à uranium appauvri ont pu être tirés sur Rochambeau et As Salman (NDLR : objectifs
militaires au début de la guerre du Golfe). »
Autres éléments à charge, les analyses toxicologiques réalisées par des experts judiciaires sur des
équipements de vétérans. Elles sont effrayantes : sur les sacs à dos, les ponchos, les armes, on a retrouvé du chrome, du plomb, de l’arsenic, du bore, de l’uranium… Comme si ces soldats
avaient subi une véritable « douche de métaux lourds » ultratoxiques. Quelles conséquences sur les soldats? Difficile de faire le lien avec les maladies d’autant plus que l’armée a toujours
refusé de donner aux experts un équipement neuf et neutre pour faire des comparaisons.
Enfin, autre pièce très accablante du dossier d’instruction, un rapport confidentiel réalisé en 1991
par l’école de défense nucléaire, biologique et chimique de l’armée de terre. On y comprend que l’armée frança