(Sentiments d’un survivant qui a l’âme en deuil.)
Par Gilbert ORHON Sous-Lieutenant (O.R.)Chef de section de la 4/4 du 1er bataillon des parachutistes coloniaux à Dien Bien Phu
Tristesse ! Ce jour-là, tous les rescapés auront une pieuse pensée pour leurs Frères d’armes morts là-bas. Certains abandonnés dans les tranchées quand nous avons été faits prisonniers. D’autres enterrés à la hâte par les bô dôïs dans un coin perdu de la brousse durant notre longue marche vers les camps. Les derniers, pendant la captivité, inhumés avec égards par leurs camarades d’infortune dans des tombes qu’ils espéraient provisoires. À 20 ans la destinée nous a marqués au fer rouge. Aujourd’hui, le poids des années ajouté à celui de ce douloureux souvenir nous laisse bien peu de force pour commémorer ce 59ème anniversaire comme il convient.
Émotion ! À Diên Biên Phù (DBP), face aux 60 000 bô dôïs Viêt-Minh 15 000 soldats ont lutté vaillamment sous le drapeau français à 1 contre 4 pendant
6 longs mois.
2 293 ont été tués. 1 047 portés disparus (morts ou
prisonniers). Le 7 mai, la garnison compte 10.300 hommes dont 4 336 blessés et 5 864 valides.
9 442 ont été faits prisonniers (1). 3 290 survivants ont été
libérés. 6 152 décès de plus ! Les camps de rééducation (plutôt d’extermination !) ont été 3 fois plus efficaces que les balles, grenades, obus de tous calibres et orgues de Staline
Viêt des violents assauts entre le 13 mars et 7 mai. En 4 mois, les 2/3 sont morts de faim, de maladie. De désespoir !
Détresse! Ces morts ne seront jamais rapatriés en France pour être enterrés dans leur village. Ils n’ont été sauvés de l’oubli que grâce à l’inscription de leur nom sur le mur du souvenir du Mémorial de Fréjus où ils figurent avec les 34 000 « Morts pour la France » en Indochine dont les corps ne reposent pas à Fréjus. Saluons le magnifique« Centre de Mémoire » de Perpignan créé en 2003 pour passer le flambeau du souvenir à nos jeunes générations. Il a donné aux héros de Diên Biên Phù une place d’honneur